Ce que je voudrais faire, quand je serai grande ? Un métier dans lequel je n’attendrai pas les vacances.
Moi, jeune et naïve
C’est un peu notre rêve à tou.te.s, non ? A moins que certains adorent avoir la boule au ventre le dimanche soir, noyer leur bullshit job dans des IPA et faire des sudoku mentaux pendant toutes ces réunions qui auraient pu être des emails.
Une fois qu’on a compris qu’on n’était pas aligné·e avec son boulot… On est bien avancé·e, mais comment en changer ? Je suis passée par là : c’est vrai, j’ai adoré mon job… Mais pour une fois, je vais être d’accord avec Beigbeder et dire que l’amour dure trois ans. Un an de passion, un an de confort et un an d’ennui. La quatrième année, il était temps de partir.
Je ne pense pas être un exemple, encore moins pour les entrepreneur.e.s (si vous cherchez des conseils pour monter un projet, je risque d’être à côté de la plaque). Par ailleurs, cet article est assez long, désolée d’avance. Mais j’espère que mon expérience pourra aider ou donner confiance à quelques personnes qui ont envie de faire un petit virage dans leur carrière ou carrément lui mettre un bon coup de frein à main.
Voici mes humbles conseils pour un dérapage (pas forcément) contrôlé.
10 choses que je me suis beaucoup trop répétées
Vous voyez le petit ange et le petit démon qui parlent à Kronk dans Kuzco, pour l’aider à prendre une décision ? Si oui, super référence. Si non, imaginez juste un combat mental entre deux voix morales contraires.
Durant tout mon processus de recherches et de mobilité pro, j’ai eu sur mon épaule un vilain petit diable qui me décourageait perpétuellement. Il me martelait tous les jours que changer, c’est…
1 – M’exposer à un échec. “Je ne sais pas comment j’ai réussi à me faufiler jusqu’ici mais si je bouge, tout le monde va se rendre compte que je suis vraiment nul.le. Je vais probablement tout foirer.”
2 – Risquer de perdre mon salaire, mon statut et mon réseau. “J’avoue que les restos étoilés avec les clients et les invit’ aux avant-premières, c’est quand même pas maaaaal.”
3 – Faire le deuil d’un ou plusieurs projets que j’ai lancé(s). « Mais qui va s’occuper de mon bébé si je ne suis plus là ?”
4 – Abandonner ma clique de collègues. “Et j’te parle même pas de ma serveuse pref du petit bar d’en bas ! »
5 – Me lancer dans un processus pénible et énergivore. “Oh la flemme, j’ai trop de travail, on verra ça après Noël. Ou dans un an, tiens.”
6 – Me confronter à un bon lot d’insécurité et d’incertitudes. “Comme je dis toujours, on sait ce qu’on perd, on sait pas ce qu’on gagne !”
7 – Bousculer toute ma routine quotidienne et l’équilibre de mes relations. « Lundi, c’est piscine, mardi, c’est raviolis, mercredi, c’est Top Chef… Tout s’emboîte à la perfection, ce serait quand même dommage.”
8 – Devoir me faire une place dans une nouvelle équipe. “Imagine, ils ne m’aiment pas. Ils partent tous à la cantine sans moi, ou pire, ils créent une conversation secrète pour me critiquer.”
9 – Tirer un trait sur mes diplômes et mes études. « Attends, j’ai quand même pas fait deux masters pour ça » (celui-ci est assez cousin de notre hésitation à changer de file devant une caisse qui n’avance pas : « J’ai quand même pas attendu pour rien, ça va finir par se débloquer. »)
10 – Et enfin… devoir rendre des comptes (à mes parents, mes potes, mon boss, la boulangère du coin…) « Coucou mamounette, ça va ? Au fait, je ne veux plus être consultante à la Défense et servir le grand capital. »
Cette liste vous parle peut-être ? Moi, en tout cas, il m’a fallu beaucoup de temps pour ignorer ce diable d’épaule.
Je t’écoute pas, t’existe pas, donc vas-y, parle à ma main.
La très vénérable Yelle
10 choses que j’avais besoin d’entendre
A ce moment-là, si j’avais eu un ange sur l’autre épaule, j’aurais vraiment aimé qu’il me murmure ces conseils.
1 – Tout le monde ne réussit pas mieux que vous. Vous n’êtes pas seul.e dans cette galère, regardez le nombre d’autre personnes paumées (j’en profite pour saluer cette superbe communauté makesense de partage entre galérien·ne·s du sens de la vie). Mine de rien, ça fait du bien de s’entendre un peu dans la bouche des autres.
2 – Ça va aller, n’ayez pas peur. Vous ne risquez pas grand chose. Vous avez peur de manquer d’argent ? Ce sera dur, c’est sûr. Mais on a souvent plus de supporters qu’on ne le pense, et ce sera l’occasion de prendre une bonne leçon de minimalisme.
3 – Célébrez vos erreurs ! Vous n’allez peut-être pas être recruté·e au premier entretien. Vous allez peut-être vivre un énorme chagrin d’amour avec une boîte. Pour parler comme les cool kids, « avancez en méthode agile » : choisissez une option, lancez-vous, plantez-vous. Procédez en rebonds successifs jusqu’à trouver votre formule (si vous aussi, vous avez changé 6 fois de pilule, vous voyez de quoi je parle).
Et si vous avez enfin trouvé un nouveau job entre temps, mais qu’il ne nous convient toujours pas, ce n’est pas non plus une raison pour s’enfermer. On a parfois besoin d’une « relation pansement » pour se sortir d’une relation longue et compliquée… C’est pareil pour le boulot.
4 – Arrêtez de ressasser. Mettez votre cerveau en veille, allez courir ou faites-vous un gâteau (un fondant au chocolat, s’il vous plaît).
5 – Il y a des gens qui peuvent vous aider. On sait tous que cette démarche peut se transformer en immense moment de solitude (hello darkness my old friend). Je vous le dis du fond du coeur, entourez-vous de vrais alliés, que ce soit des mentors professionnels ou des sages de votre entourage. En revanche, méfiez-vous des faux prophètes. Vous savez, ces gens qui ont un avis sur tout (et surtout sur votre vie) et prescrivent des solutions absolument inadaptées. “Tu ne veux pas faire une formation de développeur informatique ? Pourtant, il paraît qu’il y a des débouchés. Enfin, tu fais comme tu veux hein, je dis ça pour aider”.
6 – Vous ne connaissez pas vos propres ressources… Spoiler: vous avez bien assez de cordes à votre arc pour décocher des grosses flèches.
7 – Le danger est super bandant. C’est vertigineux et grisant de se réinventer, non ? Personne ne devrait s’attendre à ce que vous restiez la même personne toute votre vie.
8 – Vous ne devez rien à votre employeur. Les comptes sont bons : vous avez travaillé, ils vous ont payé.e… Votre sens moral vous fait honneur, mais n’en faites pas trop. Vous n’allez pas partir avec la caisse, non plus !
9 – Ce n’est ni course, ni une compétition. J’avais toujours honte de ne pas avoir changé de boulot alors que tout mon entourage enchaînait les opportunités et se faisait courtiser par des chasseurs de tête sur Linkedin (non mais, en vrai, qui sont ces gens ?). Mais chacun son timing, et on se met souvent la pression tout.e seul.e.
10 – Vous êtes une bombe, bébé. Et on laisse pas bébé dans un coin.
J’ai eu la chance d’avoir quelques anges-gardiens qui m’ont, plus ou moins, répété les mêmes mantras. A force de patience et de thé au gingembre, ça a fini par marcher. Je ne sais pas si j’ai enfin trouvé ma voie et je ne peux pas prétendre que ma lune de miel professionnelle va éternellement durer. Mais je leur en suis tellement reconnaissante, et fière d’avoir sauté le pas ! Quand on l’a fait une première fois et qu’on s’est auto-tapé dans la main, on sait de quoi on est capables.
This time, baby, I’ll be bulletproof.
La Roux
10 petits conseils qui valent ce qu’ils valent
Si vous vous êtes reconnu·e jusque là (ou pas trop mais un peu quand même sur certains points), peut-être que ces modestes conseils vous donneront un coup de main.
1 – Offrez-vous un tête-à-tête avec vous-mêmes. Avant de me lancer à corps perdu, j’aurais sûrement dû mieux décrypter le “pourquoi” de mon inconfort dans mon ancien job, et ce que j’attendais de ma nouvelle vie. Il existe de nombreuses méthodes, comme celle du ikigai, ou la méthode de feedback KADI : Keep – Add – Drop – Improve.
Keep : Que voulez-vous garder de vos missions actuelles, de vos conditions de travail ? Essayez de creuser un peu ce qui vous plait dans les tâches que vous réalisez. Est-ce c’est vraiment “monitorer les KPI de la stratégie SEA” qui vous fait vibrer, ou plutôt l’esprit d’analyse et le challenge que cela sollicite ?
Add : Qu’aimeriez-vous ajouter comme défis, comme compétences, comme environnement de travail… ?
Drop : Que voulez-vous vraiment abandonner à tout jamais ? (« Le phoning et la prospection commerciale ? Merci, mais non merci ! »)
Improve : Que pourriez-vous simplement faire évoluer : votre niveau de responsabilité sur un poste, votre rémunération, votre sentiment d’appartenance…
Si c’est long et que vous devez vous y reprendre à plusieurs fois… Vous êtes sur la bonne voie !
2 – Créez votre barème personnel. C’est une de mes techniques préférées ! Quand on cherche un nouveau poste, on brasse parfois des centaines d’offres d’emploi par jour… Alors autant bien s’équiper pour les comparer et se concentrer sur les mieux adaptées. A partir de l’exercice précédent, on peut formaliser une grille d’évaluation en listant :
Nos besoins personnels : reconnaissance, challenge intellectuel, tâches de routine, travaux manuels, vie d’équipe, impact social de l’entreprise…
Nos conditions logistiques : salaire, situation géographique, salaire, matériel nécessaire et équipements de fonction…
Nos critères professionnels : missions précises, équipe, manager, évolutions potentielles… etc.
Donnez à chaque critère une valeur (ils ne valent sûrement pas tous le même nombre de points). Vous obtiendrez ainsi une grille pour noter les offres que vous croiserez. Commencez par noter votre job actuel : si vous obtenez 10/10, vous êtes au top ! Restez où vous êtes, mais merci d’avoir lu cet article jusqu’ici ! Sinon, vous devriez obtenir une note inférieure à 8/10.
Répondez donc d’abord aux annonces qui passent cette barre des 8/10. Si vous ne trouvez toujours pas chaussure à votre pied, baissez un peu votre niveau d’exigence. Ce barème m’a aidée à ne pas postuler à n’importe quoi. Personne n’a le temps de faire des candidatures pour faire des candidatures.
3 – Abandonnez vos certitudes. Laissez vous surprendre et envisagez toutes les possibilités… Le job de rêve pourrait ne pas être celui que vous imaginez (temps partiel, télétravail, freelance, métier artisanal…).
4 – Faites le point avec votre portefeuille. On s’attend toujours à gravir l’échelle des salaires comme dans les Sims… Mais c’est peut-être encore une fausse croyance qu’on nous sert pour nous endormir. On pourrait nous faire accepter n’importe quoi (pression, horaires à rallonge, perte de valeurs…) pour décrocher la queue du Mickey.
Pour me sentir libre d’accepter mon job, j’ai eu besoin de faire une estimation de mes véritables besoins financiers. Et pas de ceux que je m’inventais (il y a sûrement des méthodes plus pro, mais je vous conseille celle qui a bien fonctionné pour moi).
Sur un mois, calculez précisément vos frais fixes : les factures régulières (forfaits, loyers…), une moyenne de courses (bouffe, clopes…), les remboursements de prêts. Listez ensuite vos frais “bonus” (achats personnels, cadeaux, restos, verres, loisirs, vacances…).
Je vais dire une banalité, mais ne vous mettez pas en danger sur la partie fixe ! En revanche, la colonne « bonus » est votre variable d’ajustement. Mon sentiment (et je suis ouverte au débat) est que l’on peut parfois rogner sur les petites dépenses gadgets pour s’offrir le luxe de l’épanouissement professionnel. Et pour être honnête, on se crée souvent des besoins artificiels, non ? (A vous de tester le mois magique !).
5 – Livrez une guerre sans merci au syndrome de l’imposteur. Je vous préviens, il est féroce. Listez tout ce que vous avez fait de badass dans votre vie (partir en voyage seul.e, survivre à une rupture, révéler un secret lourd, présenter un dossier au comex, appris la guitare avec des tutos…). Tout compte. Parlez-en avec vos meilleurs amis !
Je n’ai pas osé le faire, et j’aurais dû, mais j’ai rencontré une conseillère d’orientation qui m’a beaucoup aidée. Je lui ai dit que « je n’avais pas un profil très qualifié » et « rien de compétitif sur le marché du travail »… Elle ne me connaissait que depuis un quart d’heure et elle a réussi à me lister une dizaine de points qui ressortaient de nos échanges ou de mon CV… et auxquels je n’avais pas du tout pensé.
6 – Ne vous mettez pas trop la pression. N’y pensez pas sans arrêt, tous les jours, dans le métro et sous la douche. Je sais que c’est dur de ne pas virer à l’obsession, mais je vous conseille vraiment de ménager des moments rituels dans votre agenda. Interdisez-vous d’y consacrer la moindre attention en dehors de ces créneaux. Sinon, on peut se vider de toute notre énergie et c’est le meilleur moyen de devenir un mollusque procrastinateur (je sais de quoi je parle).
7 – N’attendez pas trop longtemps non plus. Prenez votre temps mais posez vos limites, surtout si vous êtes dans un job toxique. Il n’y a rien de pire que d’être déprimé.e, épuisé.e et dépourvu.e de confiance en soi, pour en plus devoir se vendre à un autre employeur. L’enfer ! Le syndrome que vous avez vaillamment combattu au point 5 n’est jamais très loin : il peut vous avoir à l’usure.
8 – Rapprochez-vous des sources d’information positive. J’ai beaucoup erré sur les plateformes d’offres d’emploi, et je pense être sacrément nulle pour trouver les annonces intéressantes ! Une chose que j’ai apprise durant ce processus, c’est qu’il ne faut pas s’obliger à consulter des sites qui ne nous correspondent pas. Je lisais des tonnes d’offres qui n’avaient aucun lien avec mon parcours et je désespérais de trouver. Heureusement, j’ai fini par trouver les personnes, les sites, les newsletters ou les réseaux sociaux les plus en adéquation avec mon projet.
Si vous êtes d’humeur sociable, et moins timide que moi, il y a de nombreux événements, hackathons, salons, cercles de débats, meet-up (et que sais-je encore) pour créer les rencontres avec vos futurs collègues, ou les amis de vos futurs collègues, ou les amis d’amis de vos futurs collègues…
9 – Trouvez-vous un confident au bureau. Quel soulagement d’avoir ce.tte collègue de confiance avec qui vous pouvez jouer cartes sur table, et discuter sans cachotteries. Quand on veut quitter une boîte, ce n’est pas toujours facile de révéler son jeu et balancer qu’on « regarde un peu à l’extérieur »… Mais si vous avez ce luxe, ça sauve vraiment la vie et ça aide à traverser les semaines-tunnels. Big up à ma BFF du café.
10 – Racontez-vous des histoires ! Comme je l’ai déjà dit, il n’y a rien de plus puissant qu’un bon récit. Pour (re)trouver son feu sacré, il est parfois nécessaire de s’inspirer de l’histoire des autres : lisez des biographies, écoutez des podcasts, regardez des biopics. Vous découvrirez surement les mêmes errances et les mêmes grosses plantades chez vos héros et héroïnes.
Attention, cette technique peut aussi virer à une confortable vie par procuration. “Oh, elle est tellement stylée ! Mais moi, je n’arriverai jamais à faire ça, je n’ai pas son talent”.
Si cela peut vous aider à ancrer ces modèles dans le réel, réalisez vos propres “interviews”. Proposez à des proches que vous admirez, ou à des potes de potes, de vous raconter leurs parcours professionnel en détail. A la manière du design thinking, vous obtiendrez des insights essentiels sur leurs profils, leurs moteurs et leurs blocages. Vous pourrez alors dresser un “persona type” et identifier de ce que vous pouvez développer ou révéler en vous.
I got the eye of the tiger, a fighter, dancing through the fire… ‘Cause I am a champion and you’re gonna hear me roar !
Kary Perry
Merci de m’avoir suivie jusqu’ici et d’avoir survécu à ces références musicales de qualité ! J’espère que ces pistes vous donneront un tout petit peu plus d’élan pour le grand saut. (N’étant pas du tout experte en la matière, j’imagine qu’il vaut mieux se tourner vers les organismes dédiés, les spécialistes et les bilans de compétences pour bénéficier des meilleurs conseils d’orientation. Mais tout ça pour vous dire, c’est possible, faites-vous kiffer !)
Et dites-moi. Vous avez d’autres bonnes techniques ? Je serais ravie de les connaître pour mon prochain plongeon !